Retour après deux mois de silence

, par  Genma , popularité : 4%

Ce billet fait suite au billet publié début juillet Silence sur ce blog en juin.

Sur ce blog, parfois, je publie des billets qui sont très personnels, intimistes. Et à coté de ça, il y a des choses que je n’évoquerai jamais sur ce blog. Je sais qu’Internet n’oublie pas. Et pourtant, je voudrais parler de ma situation actuelle qui a fait que pendant tout l’été, ce blog est resté assez silencieux. De la même façon que des tutoriaux informatiques m’aident à progresser techniquement, le partage des expériences de vie m’aide à m’enrichir, à progresser, à me faire des avis et opinions sur des sujets, à réaliser certaines choses. De ce fait, je publie le présent billet pour partager, pour aider d’autres personnes à travers mon témoignage personnel. Car il faut en parler. Et ce dont il faut parler, c’est le burn-out.

Une ébauche de billet qui aurait dû m’alerté

J’ai retrouvé dans un coin, des notes, les débuts d’un brouillon de billet de blogs, écrit je ne sais quand, la date n’est pas exacte car remanié, synchronisé, la date du fichier n’est plus valable.

J’y avais écrit : Les semaines passent à un rythme bien chargé. Pas facile tous les jours mais ça me plaît. Le week-end, je passe à autre chose. Je n’ai plus le temps en semaine de faire autre chose que le travail. Je n’ai que peu de temps le week-end. Mes activités publiques comme les conférences s en ressentent. Le blog a moins de parution, des billets plus spécialisés (pas encore très technique) Le partage d expérience je l ai toujours fait alors je continue en témoignant sur ma progression avec ma série de billets sur comment je deviens sysadmin... Je prends les choses toujours autant avec passion mais je prends aussi du temps pour partager l’expérience apprise. Je prends ainsi du recul.

Côté personnel aussi il y a des petites choses que je n aborderai pas sur le blog. Pas mal de réflexions et évolutions personnelles, des choses que j ai pu comprendre en ce début d’année ; l’approche des 40 ans l année prochaine, la famille qui prend de l’âge avec les complications que cela entraîne. Autant de choses qui font que l on redéfinie ses priorités personnelles. C’est ça aussi la vie.

Côté réseau sociaux. Moins de temps. Pas envie de parler et de raconter ma vie (même si c est ce que je fais par le présent billet).

Le lifehacking continue mais à un niveau plus modéré. Plus pour les choses techniques. Pour le reste je prends le temps de vivre. Je prends du temps pour moi. Je n’ai toujours pas le temps de lire. Les transports sont mes moments de bulles avec les podcasts que je suis depuis des années. Le soir ce sont les séries télé que je suis année après année avec les marathons de saisons les une après les autres.

Cela tient plus du journal intime, mais montre différents constats, des réflexions à creuser, des préoccupations, une routine...

Burn-out

Je l’abordais dans ma conférence donnée à Passage en seine, fin juin 2018, le mois de juin a été une succession de ce que l’on appelle des burn-out. Des craquages nerveux, nécessitant que je m’isole, sur mon lieu de travail, à l’abri des regards, pour pleurer. J’ai discuté avec plusieurs personnes sur le pourquoi et les raisons, la principale étant abordé dans les billets de blog le métier passion et Tout intellectualiser écrit à la mi-mars lors du premier craquage nerveux. Et j’ai continué de travailler... Durant de long mois. Jusqu’en juin et un craquage par semaine. Comme dit dans ma conférence... dans ma conférence donnée à Passage en seine. Je ne referai pas ma conférence par écrit ici.

Je n’ai pas pris d’arrêt de travail, Juillet a été 4 longues semaines de remise en question, avec deux nouvelles phases de craquage. Je ne me suis pas fait aidé, je ne suis pas allé chez un médecin pour me faire arrêter. Tout le contraire de ce qu’il faut faire quand on est en burn-out.

Cette phase de malt-être dans ma vie c’est aussi ressentie sur ce blog : absence de publication hormis quelques billets rédigés en avance. Grande phase de vide sur l’été. Quand je n’écris pas, c’est généralement signe que je suis fatigué ou dans une mauvaise phase (je reviendrai sur le sujet en abordant celui de la cyclothymie dans un prochain billet en cours de rédaction), j’aurai du le voir. Je ne l’ai pas vu. Pas voulu le voir.

Quand le corps lâche

Un premier signe que j’aurai du voir, du fait que mon corps me lâchait, est l’accident suivant. Je prends le même chemin tous les jours. Et un jour de mai, j’ai buté, je suis tombé dans la rue. En avant. Je me suis complètement étalé. Pas de vertiges, rien. J’ai juste buté. Portant des lunettes, je me suis ouvert la peau sur le nez. J’étais sur le chemin de la gare, pas loin de l’hôpital de la ville. Je préviens mon employeur, passage par la case des urgences. On me soigne, coupure de la peau arrachée, deux semaines de pansement sur le nez. J’avais un arrêt de travail de deux jours mais je suis allé au travail. De cet accident, j’en ai gardé une cicatrice, discrète, mais qui chaque matin me rappelle dans le miroir que je suis tombé, je me suis relevé et que j’ai continué comme si de rien n’était.

Le signe de trop

Chez moi, extériorisation de ma colère est de taper du poing dans un mur ou dans une porte. Je m’isole, je pleure, et je tape dans un mur. Une à plusieurs fois. Je frappe sans me faire mal, je retiens mon coup, je ne veux pas me blesser. Aucune volonté d’automutilation, juste une extériorisation de la colère. Et je ne veux pas que ça laisse de trace sur moi, qu’on sache que je ne suis pas bien. J’ai déjà fait ça dans des phases difficiles de ma vie, durant mes craquages de juin, une fois par semaine, j’ai eu la même réaction : je m’isole, les escaliers de secours de l’immeuble sont bien pour ça...

Et en juillet, quand je pensais que ça allait mieux, 10 jours que je n’avais pas craqué, j’ai eu une nouvelle phase où ça n’a pas été. Rite devenu habituel, je m’isole, je ferme le poing, je tape. Quand l’index de ma main a gonflé et est devenu violet, j’ai compris que c’était le signe que mon corps me lâchait une fois de plus. J’avais cassé quelque chose. Passage par l’infirmerie du bâtiment, glace, le doigt bouge et dégonfle. Discussion avec l’infirmière sur le suivi nécessaire, l’urgence d’arrêter tout et de me faire soigner physiquement et psychologiquement. Mon doigt bouge, dégonfle, est bandé. C’est presque la fin de journée. Au lieu de prendre mes affaires et partir, je suis retourné travailler comme si de rien n’était, de même pour le lendemain. Mon doigt est gonflé, deux fois plus que la normal, mais bouge, je sens une gène mais ça va. J’ai continué de travailler jusqu’à mes vacances début août.

Dans les jours et semaines qui ont suivi, et encore aujourd’hui, quand j’écris ces lignes durant mes vacances, quand je plis le doigt, je sens une légère douleur qui me rappelle jusqu’où je suis allé.

Vacances - Retour aux sources

Peu de personnes le savent, je ne sais pas si j’ai déjà abordé le sujet. Ma mère est Polonaise et j’ai donc passé tout mes été d’enfance et d’adolescence dans un tout petit village au milieu de nulle part dans la campagne polonaise. Quand je parle à des Polonais de la région où je vais, au Nord de la capitale et au sud de de la région des grands lacs, tous me disent "Mais il n’y a rien là-bas". J’aurais plein de choses à raconter sur ma vie là-bas, l’évolution entre le Pologne des années 80 et celles d’aujourd’hui, le passage des frontières et du rideau de fer, la pauvreté, l’alcoolisme, la vie dans un petit village avec les commérages, les rumeurs, la vie au rythme des saisons des paysans... Tout ça a fait une partie de celui que je suis. Mais tout ça ce sont plein d’autres histoires...

Adulte, je retourne donc en Pologne dans le village où est ma famille maternelle, tous les 3-4 ans, tandis que mes parents continuent d’y aller chaque été depuis 40 ans. Quand les vacances sont venues, comme j’avais prévu de partir quelques jours avec mes parents, je suis parti avec eux. J’avais besoin, du fait de mon burn-out, de faire un retour aux sources. De revenir aux fondamentaux.

Sur la route

Deux jours de voyages, 2 fois 10 heures de route. 1700 km. Deux jours passer à essayer de me vider l’esprit. Chaque kilomètre d’autoroute absorbe un peu du stress cumulé ces derniers mois. Ma mère lit un livre, mon père conduit (et refuse de laisser quelqu’un autre conduire). Moi je regarde la route et me vide la tête. Je pense à mes souvenirs d’enfance, aux personnes que j’ai connu, à tous ces cousins - du côté de ma mère, chaque génération précédent la mienne a eu en moyenne 5 enfants et donc j’en ai des cousin.e.s... Au village qui se vide, où disparaissent peu à peu les personnes âges, à ma grand-mère passée dans la génération des arrières grand-parents, à mes parents que mes neveux nièces appellent "djadek" et "babtcha", volonté de se rappeler d’où on vient. Je me vide la tête. L’asphalte se déroule sous les pneus et c’est une sorte d’exutoire.

Sur place

Sur place, modernité oblige et vive le roaming, j’ai Internet en 3G sur le smartphone, je ne me déconnecte pas. Je garde un lien avec ce que j’aime, l’actualité informatique, les réseaux sociaux pour avoir des nouvelles des copains.copines des Internet...

Mais enfin, je me déconnecte du boulot. Je pense de moins en moins au boulot. Je ne regarde pas mes mails. Je me le suis interdits. Et je tiens. J’ai été et je suis un workoolic (contraction de work et alcoolic en anglais) : tel un alcoolique qui ne boit plus et ne touchera pas de verre, même pas un, je ne regarderai pas un mail, pas une seule fois.

Le retour aux sources, c’est aussi pour moi de revenir à qui est Genma. Le Genma qui s’est fait mangé par sa passion. Là, j’ai du temps pour me poser, réfléchir. Le temps s’est arrêté. On vit à un rythme différent : lever au son du coq avec le soleil, coucher à la nuit tombée avec les poules (ce ne sont pas que des expressions), la sortie du jour étant d’aller en ville faire quelques courses et d’aller voir de la famille. Ballade dans un village désertifié. Le vide dans les journées passées avec la famille, pendant des heures à parler de tout et de rien. Et mon esprit se vide.

Vacances

J’ai donc passé 3 semaines en vacances - qui aurait du être trois semaines d’arrêt maladie. Plusieurs fois par jour, j’ai pensé au boulot, à ce qui pouvait se passer. Quand je me suis connecté depuis un PC pour aller sur Internet, j’ai dû résister à l’envie d’aller jeter un coup d’oeil à l’outil de supervision aux mails, à celle d’allumer le téléphone pro pour regarder si je n’avais pas des messages urgents. Mais j’ai tenu bon.

Et pourtant, je sais l’addiction au travail, le stress, ne sont pas loin. J’ai eu plusieurs fois où je me suis réveillé la nuit avec une phase d’insomnie. Signe qu’à tout moment je pouvais replonger et ces trois semaines de coupure étaient on ne peut plus nécessaire. Et signe que comme je le dis, j’ai passé 3 semaines en vacances qui aurait dû être trois semaines d’arrêt maladie pour ensuite avoir de vraies vacances.

Conclusion

Quand ce billet sera publié, j’aurai repris le travail. Avec mon recul des 3 semaines, toutes ces heures passés à réfléchir, mon sevrage, j’espère pouvoir repartir sur de bonnes bases. Mais je sais aussi qu’au moindre nouveau signe, je me ferai aider. J’irai voir mon médecin. La prise de recul m’a permis de prendre aussi le courage de savoir que, si je ne suis pas bien, je dois me faire aider. Pas de honte, pas de tabou. Juste un humain qui a besoin de se préserver.