Faire le lien entre mon pseudo et ma véritable identité
Par mail, un lecteur m’a posé la question suivante "si quelqu’un parvenait à faire le lien entre ton pseudo et ta véritable identité, quel "pouvoir" pourrait-il détenir envers toi ? Sous une autre formulation : comment mettre en balance la volonté d’un pseudo-anonymat strict et les risques associés à sa divulgation ...?
J’avais répondu à cette question par mail. J’ai pris le temps de re-réfléchir à ma réponse, j’ai repris la réponse et je la complète. Voici donc ma réponse, que je partage avec tout le monde.
Certaines personnes (mes amis proches) connaissent mon pseudonyme et ma véritable identité, du fait qu’avant d’être un pseudonyme, c’était une sorte de surnom. C’était plus pour l’aspect amusant, la différenciation, l’intégration dans un groupe d’otaku que j’avais pris ce qui est devenu un pseudonyme. J’ai très tôt différencié mon identité de mon pseudonyme, utilisant majoritairement mon pseudonyme pour toutes mes activités sur Internet.
En effet, le pseudonyme et l’avatar associé permette de masquer mon âge, mon sexe, mon origine. Bien que l’on devine très facilement le fait que je suis un homme, que j’ai désormais 35 ans (ce sont là des informations que je n’ai jamais caché), l’avatar et le pseudonyme sont pour moi une barrière, un masque, qui me permet de m’affranchir de préjugés sociétaux. Qu’importe si la personne en face de moi (dont je lis l’article de blog, le commentaire, le message ou la discussion) soit un homme, une femme, un jeune, un vieux... Ce qui importe, c’est ce que cette personne en tant qu’individu a à m’apporter : une information, un élément de réflexion, un enrichissement intellectuel ou culturel. L’avatar et le pseudo permettent de masquer le sexe, l’âge, l’origine, pour ne ce concentrer que sur ce qui est important.
Je cloisonne ce que je fais sur Internet de ma véritable identité. Parce qu’il m’arrive de passer du temps (quand j’en ai), sur Internet, à faire des activités de Genma, et ce sur mon temps de travail. Je fais ce pour quoi je suis payé, je le fais bien. Mais je n’ai pas tout le temps des choses à faire, ou j’ai des pauses. Et durant ce temps, je suis "Genma".
Mais je ne souhaite pas que mes collègues sachent que je suis "Genma". Car ma présence régulière sur Internet pourrait être vue comme de la procrastination, là où c’est en réalité du multitâche. De plus, j’ai écrit différents billet sur le blog ou des messages sur les réseaux sociaux dans lesquels je critique ma hiérarchie. Et bien ce que soit des critiques argumentées (et que j’estime légitime), bien que ce ne soit pas de la diffamation (et il n’y ni insulte, ni vulgarité, uniquement des faits et des avis, certes très subjectifs), cela pourrait me bloquer pour ma progression dans ma carrière. Je pense que l’on aurait une toute autre vision de moi, de celle que je donne.
De même, mon côté geek, bidouilleur, à tendance hacker, font que, sur la machine qui m’a été fournie pour effectuer mon travail, un PC, sur lequel :
– j’ai installé et j’utilise TOR
– j’ai mis un double boot avec Ubuntu
– j’ai désactivé VNC et la prise en main à distance
– j’ai désactivé des services Windows, je fais les mises à jour moi-même (sans attendre celles qui ont été validées et approuvées par la DSI)
– j’ai installé des logiciels moi-même (uniquement des logiciels libres) pour des besoins professionnels ou personnels (cygwin, truecrypt par exemple)
Mon ordinateur ne passe donc jamais par le support informatique car je ne respecte pas plusieurs paragraphes de la charte informatique. J’en ai conscience, je le sais. Mais si je veux pouvoir m’épanouir un minimum dans mon travail (et c’est souvent loin d’être le cas), ces bidouilles et autres geekeries sont nécessaires. Tout comme le contournement du proxy... Cela me travaille et me conduit à en rêver la nuit.
Si quelqu’un de mon entreprise faisait le lien, vu l’identité publique et toutes les informations publique que je donne (attention à ne pas confondre avec des informations personnelles. Je garde beaucoup de choses personnelles pour moi. Il y a quelques billets de réflexions, plus intimistes, mais au contenu soigneusement choisi. Tout le reste entre dans le cadre d’un échange, d’un partage de connaissance et de savoir, ou de discussion publique, en tant que personne publique), on m’assimilerait à "un hacker". Oui j’anime des cryptoparties, je manipule des outils comme Tor, je m’intéresse à la protection des mes données personnelles, à l’anonymat et à la vie privée, mais je me qualifierai plus de un geek bidouilleur, parfois greyhat (mais assez débutant dans ce domaine). Je ne vais vraiment rien de méchant. Si ce n’est repartagé mes connaissances, les vulgariser et apprendre à tout le monde à être anonyme et à protéger ses données personnelles, en redispersant mes propres connaissances et les nouvelles choses que j’apprends.
Je ne sais pas si la société de service en informatique (SSII) pour laquelle je travaille, et ma hiérarchie apprécierait cette nouvelle image qu’elle pourrait avoir de moi. Ce que je fais sous pseudonyme est totalement décorrélé de mes missions. Je n’utilise aucune information ou connaissance acquise lors d’une mission avec/pour/chez un client. L’inverse est moins vrai : ce que je sais en tant que "Genma", mes connaissances geek apprises en autodidacte me sont souvent bien utiles pour me débrouiller et m’en sortir sur des missions où je suis laissé seul, sans aucune aide...
Mon but pour l’instant est donc de ne pas me faire remarquer, de ne pas mettre un projecteur sur moi. Car je ne sais pas évaluer à l’heure actuelle les conséquences d’une levée de mon anonymat.