Faire face au problème du harcèlement en ligne, article de l’EFF

, par  Genma , popularité : 5%

L’Electronic Frontier Foundation (EFF) est une organisation non gouvernementale internationale à but non lucratif, fondée en 1990 aux États-Unis par Mitch Kapor, John Gilmore, et John Perry Barlow. L’objectif essentiel de l’EFF est de défendre la liberté d’expression sur Internet. C’est l’équivalent américian de la Quadrature du Net. http://www.eff.org/

J’ai participé à un appel à traduction en plusieurs langues, dont le français, du texte EFF - Facing the Challenge of Online Harassment https://www.eff.org/deeplinks/2015/01/facing-challenge-online-harassment.

Je mets donc ici la traduction (qui sera mis également sur le site de l’EFF prochainement).

Début de la traduction

Durant les 25 dernières années pendant lesquelles l’EFF a défendu les droits numériques, notre croyance en la promesse d’Internet n’a cessé de grandir. Le monde numérique libère les utilisateurs de beaucoup des limites dans la communication et la créativité qui peuvent exister dans le monde déconnecté. Mais il s’agit aussi d’un milieu qui reflète les problèmes de la société et ils y prennent de nouvelles dimensions. Le harcèlement est l’un de ces problèmes.

Le harcèlement en ligne est une question lié au droit numérique. Dans le pire des cas, il provoque des préjudices réels et durables à ses victimes, un fait qui doit être au centre de toute discussion sur le harcèlement. Malheureusement, ce n’est pas facile de faire établir des lois ou des règlements qui aborderont ces préjudices sans ouvrir la porte à la censure du gouvernement ou des entreprise et l’invasion de l’espace lié à la vie privée, y compris la vie privée et la liberté d’expression des victimes de ce harcèlement. Mais, comme nous le verrons ci-dessous, il existe des moyens pour élaborer des réponses efficaces, ancrées dans les idéaux de base sur lesquelles Internet a été construit, pour protéger les victimes de harcèlement et leurs droits.
Ce texte explique notre réflexion sur la lutte contre le harcèlement en ligne, et ce que nous pensons que le rôle de l’EFF peut être dans cet effort, étant donné la portée de notre travail. Ce n’est pas notre dernier mot, et ça ne doit pas l’être ; ce n’est pas une question simple. Au lieu de cela, nous voulons décrire certaines des choses auxquelles nous pensons quand nous réfléchissons à ce problème et esquissons quelques éléments de réponses efficaces face à lui.

Le harcèlement est un problème sérieux

Soyons explicite sur ce que nous entendons par le mot « harcèlement ». Nous ne parlons pas de quelques tweets déviants ou le fait de donner lieu ou de prendre part à des débats en ligne, même si ces débats incluent de la vulgarité ou des obscénités. Des propos vulgaires ou agressifs ne conduisent pas toujours au harcèlement.
Le type de harcèlement sur lequel nous sommes inquiets est ce qui se passe quand les utilisateurs d’Internet attirent l’attention du mauvais groupe de personnes ou d’un individu et se retrouvent la cible de niveaux extrêmes d’hostilité ciblés, souvent accompagnés de l’exposition de leur vie privée. Certaines victimes sont bombardés par de la violence, des images personnalisées et de nombreux commentaires inquiétants. L’adresse de leur maison et de leur lieu de travail peuvent être rendues publique, accompagné de menaces de violence. Et ce type de harcèlement en ligne peut dégénérer en un harcèlement déconnecté, des agressions physiques, et plus encore.

Ces types de harcèlement peuvent être profondément dommageables pour les droits à la vie privée et à la liberté d’expression des victimes. Ils sont fréquemment utilisés pour intimider ceux qui ont moins de pouvoir politique ou sociale, et affecte de manière disproportionnée certains groupes, y compris les femmes et les minorités raciale et religieuse.1. Ce qui signifie que tout le monde ne peut apprécier le niveau auquel cela affecte de façon négative la vie des autres.

L’expression "Ne pas nourrir les trolls"- qui peut fonctionner dans certaines situations - est une réponse insuffisante à ce niveau de violence, surtout quand une situation s’aggrave, passant de quelques commentaires à une campagne de harcèlement. Certaines personnes ont même été chassées complètement du monde connecté par les effets cumulés des attaques personnelles incessantes ou par de graves menaces pour leur sécurité, ou la sécurité de leurs proches. Lorsque cela se produit, leurs voix ont effectivement été réduites au silence.

La triste ironie est que les harceleurs en ligne abusent de la force fondamentale de l’Internet comme moyen de communication puissant pour agrandir et coordonner leurs actions et en réduisant efficacement au silence et en intimidant les autres.
Mais cette même force offre aux communautés Internet une façon de se battre : lorsque que l’on constante un comportement de harcèlement, nous pouvons en parler pour le contester. En fait, une des méthodes les plus efficaces pour lutter contre le harcèlement en ligne est le contre-discours. Le contre-discours, c’est ce qui se passe lorsque des sympathisants d’un groupes ou des individus utilisent ce même pouvoir de communication du Net pour appeler, condamner, et s’organiser contre des comportements qui réduisent d’autres personnes au silence. C’est pourquoi, contrairement à certaines hypothèses erronées, la lutte pour la liberté d’expression et la lutte contre le harcèlement en ligne ne sont pas antinomiques, mais complémentaires.

Parce que la loi permet parfois à une personne d’être un imbécile (ou pire) ne signifie pas que d’autres dans la communauté sont tenus de se taire ou de rester les bras croisés et de laisser les gens être harcelés. Nous pouvons et nous devrions les défendre contre le harcèlement. Faire ainsi, ce n’est pas la censure - c’est une partie de la lutte pour un Internet comme support d’intégration et d’expression.

Les pièges du règlement juridique sur le harcèlement en ligne

Beaucoup de gens ont étudiés la loi relative à la lutte contre le harcèlement en ligne, et l’EFF est régulièrement appelé à évaluer les lois et les règlements proposés. Compte tenu de nos années d’expérience avec les lois mal écrites qui ne reflètent pas les réalités de l’environnement numérique, nous sommes très prudents dans l’approbation de ces mesures.

Certaines formes de discours abusif sont déjà couvertes par la législation existante. Aux États-Unis, par exemple, les menaces de violence visant à mettre la cible dans un état de peur ne sont pas protégées par la liberté d’expression et sont illégales en vertu des lois fédérales et étatiques. Les lois anti-harcèlement existent aussi dans de nombreuses juridictions. Les gens peuvent intenter une poursuite au civil basée sur des fausses déclarations qui portent atteinte à la réputation d’une personne. Et de nouvelles lois visant à comportement sur Internet ont déjà été adoptées aux États-Unis. Par exemple, 37 États ont des lois sur le harcèlement en ligne, et 41 des lois sur la traque en ligne.

Hors ligne et en ligne, nous voyons les mêmes problèmes : les lois visant à lutter contre le harcèlement sont rarement appliquées, ou sont appliquées de façon injuste et inefficace. Partout dans le monde, les personnes en charge de faire appliquer la loi ont souvent du mal à prendre au sérieux les plaintes concernant les menaces en ligne ou souvent ne comprennent tout simplement pas leur gravité. Comme le fait remarquer Danielle Citron, la police dit aux plaignants de simplement « rentrer à la maison et d’éteindre leur ordinateur » ou leurs répondent seulement que « Vous savez, les garçons, ce sont des garçons… ».

L’échec des résultats de l’application des lois existantes conduit à des appels à une nouvelle réglementation plus stricte, y compris des lois qui ciblent généralement la liberté d’expression. Mais des lois qui ne font pas une délimitation stricte entre le harcèlement et la liberté d’expression peuvent finir par prendre resserrer la liberté d’expression tout en omettant de limiter le comportement des harceleurs.
Les gens puissants, des sociétés, des gouvernements et des foules en ligne sont tous aptes à trouver les meilleurs outils pour la censure et à les utiliser pour étouffer la critique et de la dissidence. Ils sont également tout à fait disposés à utiliser des outils développés dans un seul but à leurs propres fins. (Par exemple, nous avons une longue expérience avec le droit d’auteur et le droit des marques qui sont utilisées pour étouffer la critique et la parodie. Nous avons même fait un "mur de la honte" consacrée à ces dérives.)

La règlementation de l’anonymat en ligne est également très susceptible de causer des dommages collatéraux. Il est tentant de supposer que l’élimination de l’anonymat réduira le harcèlement. Notre expérience est différente : nous voyons un grand besoin d’une protection solide pour l’anonymat en ligne, de sorte que ceux qui sont harcelés, ainsi que pour ceux qui font face à la violence domestique/conjugale, les victimes de violations des droits de l’Homme, et d’autres conséquences pour s’être exprimé, peuvent néanmoins le faire avec moins de crainte d’être exposer. C’est pourquoi, lorsqu’il est appelé à une législation visant à lutter contre le harcèlement nécessitant l’obligation pour les sites de collecter toutes les adresses IP des visiteurs, notre première pensée est de craindre qu’une telle législation sera détournée pour cibler les victimes et non les auteurs de harcèlement. Grâce à des stratégies comme celles-ci, nous risquons non seulement ne pas résoudre le problème prochainement, mais à la longue, de blesser certaines des personnes que nous espérions pouvoir aider.
Ceci est une raison pour laquelle nous luttons pour la prudence et la transparence dans tous les domaines juridiques qui peuvent avoir une incidence sur la liberté d’expression. Lorsqu’il s’agit de harcèlement en ligne, qui si souvent conduit à réduire au silence les voix de personnes sans pouvoir, cette préoccupation est particulièrement importante.

Nous nous opposons à des lois qui tentent de lutter contre le harcèlement en ligne, mais en le faisant négligemment, avec peu d’égard pour les risques pour l’expression légitime. Par exemple, récemment, la Cour d’appel de New York a invalidé une loi de la cyber-intimidation qui a fait d’un crime le fait de « harceler, importuner, menacer ou toute autre façon d’infliger des dommages émotionnelle importante à une autre personne, » car cela allait « bien au-delà de la cyber-intimidation des enfants ». Après tout, la liberté d’expression pourrait très bien être « gênante », mais ce n’est guère une raison suffisante pour l’interdire.

Mais en plus de dénoncer de mauvaises propositions, nous pensons également à de meilleures solutions juridiques. Il pourrait certainement y avoir une meilleure application des lois existantes en matière de harcèlement – il s’agit d’une préoccupation qui s’étend au-delà du monde en ligne (comme indiqué ci-dessus.) Nous espérons que les tribunaux finiront par intégrer l’existence des nouveaux moyens par lesquels les individus peuvent être ciblés dans leurs décisions et précédents , et que les institutions en charge de l’application des lois feront systématiquement former leurs personnels sur le sujet du harcèlement en ligne.

Après des années d’expérience, cependant, nous sommes pessimistes en ce qui concerne les lois rédigées pour faire face aux nouvelles menaces de type "cyber", qui sont plus faites pour épater la galerie et permettre aux politiciens de dire qu’ils ont fait quelque chose. C’est pourquoi ces lois sont si souvent le pire des deux mondes : elles sont en grande partie ou totalement inefficaces à lutter contre le harcèlement, mais sont également si mal rédigées qu’elles menacent des comportements légalement protégés, en renforçant les problématiques qu’elles devraient condamnées, et en condamnant les points de vue qui sont à son encontre.

Comme Glenn Greenwald l’a écrit dans un récent article sur la façon dont les Arabes et les musulmans, en particulier, sont la cible d’une enquête judiciaire pour leur expression en ligne, « Comme la loi en général, la criminalisation de l’expression en ligne est seulement réservé à certains types de personnes (celles qui ont le moins de pouvoir) et certains types de point de vue (les plus marginalisés et l’opposition). » Bien que ce ne soit pas toujours vrai, cela l’est assez souvent que nous approchions les solutions juridiques avec une extrême prudence.

Les entreprises sont mauvaises en ce qui concerne la régulation de l’expression

Nous comprenons aussi pourquoi les gens se tournent vers les plateformes de réseaux sociaux populaires eux-mêmes afin d’obtenir des solutions, étant donné qu’une majorité du harcèlement se produit là-bas. Encore une fois, notre expérience nous laisse sceptiques quant au fait que la solution soit dans une gestion centralisée par les entreprises.

Actuellement, la plupart des fournisseurs hébergement en ligne, y compris les plates-formes comme Facebook et Twitter, interdisent le harcèlement dans leurs conditions d’utilisation, mais ne régulent pas de manière proactive le comportement des utilisateurs. Au lieu de cela, ils s’appuient sur un signalement communautaire, ou marquage, pour localiser et supprimer du contenu ou des comptes d’utilisateurs qui violent leurs conditions de service. Les rapports sont envoyés aux équipes de modération qui sont souvent peu soutenus, gérés à distance, et payés beaucoup moins que la plupart des autres travailleurs de la technologie. Les décisions concernant le contenu sont prises rapidement, et les suppressions erronées de contenu ou des comptes signalés sont assez fréquentes.

Aux États-Unis, les entreprises ont généralement le droit légal de choisir d’accueillir, d’héberger ou non, des textes en ligne selon leur propre discrétion. Nous avons passé beaucoup de temps à analyser sur le comment ils font ces choix et avons constaté que leurs pratiques sont au mieux inégales, et au pire biaisée. Les discours politiques et religieux sont régulièrement censurés, comme ce qui concerne la nudité. Au Vietnam, les mécanismes de signalement de Facebook ont été utilisés pour faire taire les dissidents. En Egypte, en s’appuyant sur les conditions d’utilisation du nom de l’entreprise, a conduit Facebook à fermer de nombreuses pages qui ont permis l’émergence du printemps 2011, dans le but apparent de protéger les utilisateurs d’un éventuel harcèlement. Et aux États-Unis, les conditions d’utilisation ont amenées la suspension des comptes de militants LGBT. De tels exemples abondent, nous rendant sceptiques sur le fait qu’un renforcement des contrôles par ces entreprises améliorerait l’état actuel des méthodes de signalement d’abus.

Les trolls et les regroupements en ligne, sont, par définition, des groupes tout désignés pour diriger efficacement un tir concentré contre d’autre. Cela signifie que les messages des victimes harcèlement sont éjectées de la discussion en ligne le poids de la foule les faisant ressembler à des messages radicaux et en dehors du flux de pensée commun. Pour trouver des exemples de cela, il suffit de regarder pour les gouvernements, tels que la Chine, Israël et Bahreïn qui emploient des commentateurs payés pour influencer l’opinion en ligne en leur faveur. Et bien sûr, il y a beaucoup de trolls prêts à le faire gratuitement.

Nous nous inquiétons également du fait que les modèles financiers du lot actuel de réseaux sociaux centralisés, monolithiques, et multinationales (mais cependant basé aux États-Unis) vont à l’encontre de la préservation de la liberté d’expression et de la sécurité et de la vie privée des personnes cible de harcèlement. Ces entreprises se concentrent sur leurs revenus et leur sécurité juridique. Beaucoup seraient prêtes à sacrifier la liberté d’expression si elle commençait à leur coûter trop cher.

Certains ont suggéré de réviser la section 230 du Communications Decency Act (CDA 230) pour obtenir de ces entreprises plus d’implication dans la protection des cibles de harcèlement. Le CDA 230 établit que les intermédiaires comme les fournisseurs d’accès, les forums Web et autres sites de médias sociaux sont protégés contre une série de lois qui pourraient autrement être utilisé pour les tenir juridiquement responsables de ce que leurs usagers disent et font. De telles propositions rendraient les intermédiaires au moins partiellement responsables des actions de leurs utilisateurs. Un tel changement serait une grave menace à la ligne directrice financière de ces entreprises.

Malheureusement, au lieu de renforcer l’engagement dans la lutte contre le harcèlement, le risque financier fera probablement des dégâts dans les communautés en ligne. Face au risque d’une telle responsabilité, de nombreuses entreprises choisiront d’exclure toutes formes de discours controversé de leurs plates-formes, y compris des expressions de colère légitime et de discours politique.

Si, par exemple, toute mention d’Israël et de la Palestine a déclenché une montée du harcèlement et des poursuites judiciaires, combien de temps faudra-t-il avant que les fournisseurs de services interdisent toute mention de cette situation politique ? Lorsqu’un aimant au harcèlement comme le gamergate a lieu sur une plate-forme sociale, est-ce que les opérateurs de ces plates-formes chercheront à découvrir qui sont les auteurs de ces préjudices ou vont-ils tout simplement interdire tout le monde de se exprimer et de partager leur expérience ?

Quelques points de départ pour de bonnes solutions

Nous pensons que les meilleures solutions au harcèlement ne résident pas dans la création de nouvelles lois, ou dans l’attente que les conditions d’utilisation des services en lignes des entreprises aillent dans l’intérêt supérieur des personnes harcelées. Au lieu de cela, nous pensons que le meilleur plan d’action sera ancrée dans les idéaux de base qui sous-tendent l’Internet : la décentralisation, la créativité, les communautés et la responsabilisation des utilisateurs.

L’application de la loi et les lois

L’application de la loi doit reconnaître et devenir plus proche de la réalité du harcèlement en ligne, de sorte que l’on puisse identifier les menaces réelles sur la sécurité et protéger les personnes en danger, plutôt que de s’occuper des membres de la communauté qui critiquent les conditions d’utilisation ou d’enfants qui postent des paroles de rap sur Facebook. Les préceptes juridiques éprouvés par le temps (comme le droit de la diffamation) doivent être soigneusement appliquées au monde en ligne ; le fait que quelque chose soit dit en ligne ne doit pas être entrave à la responsabilité, ni une excuse pour abaisser le niveau de la criminalisation de la liberté de parole. Et les tribunaux doivent se familiariser avec le traitement des cas impliquant le comportement en ligne.

Responsabiliser les utilisateurs. Vraiment.

Les utilisateurs devraient être habilités à agir par eux-mêmes, plutôt que d’avoir à compter sur des équipes pour la protection. Des outils de défense contre le harcèlement doivent être sous le contrôle des utilisateurs, au lieu de dépendre d’un retrait agressif de contenu centralisé, dont on peut facilement détourner l’utilisation. Les plates-formes ont comme responsabilité de travailler sur ces fonctionnalités, mais nous pensons — comme toujours — que les meilleures solutions proviendront des utilisateurs eux-mêmes.

Comment la technologie pourrait aider à défendre les victimes de harcèlement ? L’innovation est difficile à prédire, mais voici quelques directions que pourrait cette responsabilisation des utilisateurs :
• Rendre le filtrage des messages harcèlement contrôlés par l’utilisateur plus puissant. Il y a déjà beaucoup d’idées sur comment les sites pourraient permettre un blocage plus configurable. Si les plateformes ne sont pas disposés à fournir ces solutions, elles devraient ouvrir leurs plateformes afin que d’autres le fassent.
• Mettre en place de meilleures façons pour les communautés de surveiller collectivement le harcèlement afin d’y répondre — plutôt que, comme c’est le cas aujourd’hui, d’imposer le fardeau aux utilisateurs de gérer eux-mêmes leur propres flux de réseau social.
• Des outils automatisés permettent aux personnes de suivre et de limiter la disponibilité en ligne des renseignements personnels les concernant (y compris les sources de données publiques), permettant de mieux se défendre contre les menaces de doxxing.
• Des outils permettent aux victimes de harcèlement de conserver des preuves recevables pour une plainte en justice. Les rapports d’abus sont actuellement conçus pour les processus internes des entreprises de l’Internet et non pour le système juridique.
• Favoriser un meilleur usage des outils liés à la protection de l’anonymat et du pseudonymat. Lorsque les locuteurs choisissent d’être anonyme pour se protéger contre un harcèlement hors connexion, ils devraient pouvoir le faire facilement et ce sans connaissances techniques approfondies.

Toutes ces solutions techniques sont actuellement utilisées, mais la progression de leur usage est parfois limitée par des facteurs externes. Les principaux sites bloquent des outils comme Tor par crainte d’abus, verrouillant la possibilité de s’exprimer pour des personnes ne souhaitant pas partager leur localisation. Les plateformes de réseaux sociaux entravent l’élaboration de nouveaux outils en verrouillant les APIs et en limitant l’utilisation externe des contenus utilisateurs.

Elargir le cercle des créateurs d’outils

Les mainteneurs de réseaux sociaux ont besoin de mieux comprendre le comportement auxquels les individus harcèlement font face, et le monde des concepteurs d’outils en ligne doit refléter la diversité des usagers de l’Internet. Un des meilleures façons de le faire est de s’assurer que tout le monde est la capacité et le droit d’innover – si bien que les entreprises centralisées devraient élargir également leurs horizons.

Embrasser les discours allant à contre-sens

Il n’y a rien d’incompatible à la fois d’aimer la liberté d’expression et de s’exprimer contre le harcèlement. Nous soutenons les personnes qui se dressent et s’expriment contre le harcèlement au sein de nos propres communautés, surtout celles qui ne peuvent le faire sans devenir la cible de harcèlement elles-mêmes. Proférer des menaces de violence et s’engager dans une violence populaire n’est pas un acte noble de la liberté d’expression. L’appel au rejet d’un tel comportement est la bonne chose à faire.

Voir plus loin

L’EFF continuera d’être un ardent défenseur de la liberté d’expression et de la vie privée en ligne, parce que nous croyons sincèrement que ces valeurs protègent tout le monde, y compris les plus vulnérables. Nous allons aussi rester critiquer vis-à-vis des nouvelles réglementations, et le fait de remettre les rênes du maintien de l’ordre en ligne aux mains d’entreprises privées. Nous allons continuer à travailler pour soutenir le développement et la propagation de solutions technologiques qui peuvent aider les victimes de harcèlement, en faisant campagne pour l’autonomisation de l’utilisateur, l’innovation et les réseaux ouverts. Nous essaierons de vous aider directement avec des conseils pratiques via des ressources comme le guide Surveillance Self-Defense, ou encore la création de guides qui répondent aux préoccupations des groupes vulnérables. Nous savons que nous ne sommes pas les seuls concernés par ce sujet, et nous sommes heureux qu’il existe de nombreux autres groupes et individus compétents luttant contre le harcèlement en ligne.

Depuis que l’EFF a été fondée en 1990, des personnes du monde entier se sont réunies pour construire un étonnant ensemble d’outils qui permettent d’améliorer la communication entre les personnes et ce bien plus qu’à aucun autre moment dans l’Histoire. Les avantages de cette révolution numérique sont énormes et nous sommes encore en train d’en effleurer la surface. Nous commençons seulement à comprendre comment atténuer ses inconvénients. Si les objectifs de harceleurs en ligne sont de réduire au silence et d’isoler leurs cibles, nous pensons que la meilleure opposition est de défendre ces mêmes droits qui nous permettent d’innover, de travailler ensemble, et de s’élever contre ces abus en ligne.
• 1. Selon des études menées par le Bureau de statistique juridique en 2006-2009, la prévalence du harcèlement criminel et du harcèlement connexe de toutes sortes (y compris le harcèlement en ligne) aux États-Unis varie selon le sexe, l’âge, le niveau de revenu, et la race - les femmes, les jeunes, les pauvres et les groupes minoritaires tels que les Amérindiens et les familles multi-raciales étant le plus souvent touchés. Une récente étude Pew de harcèlement en ligne a indiqué que les femmes âgées de 18 à 24 sont ciblées pour harcèlement en ligne et de harcèlement criminel à un taux plus élevé que les autres groupes. Le sondage Pew note aussi que, dans les États-Unis, les utilisateurs africains-américains et hispaniques Internet font état de harcèlement à des niveaux supérieurs (54% et 51%) par rapport aux utilisateurs blancs (34%).

Fin de la traduction