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Réflexions sur l’autocensure

D 6 février 2017     H 09:00     A Genma     C 4 messages   Logo Tipee

TAGS : Les réflexions du Genma

Pour celles et ceux qui me suivent depuis longtemps, ces personnes savent que j’ai pendant des années gérer mon identité numérique publique sous la forme d’un pseudonymat, séparant de façon très distincte mon identité civile de mon identité publique, rendant assez difficile le lien entre les deux. Des années pendant lesquelles la réflexion sur cette stricte séparation est mainte fois revenue, a évoluée pour finir il y a quelques mois par devenir une volonté de changer, d’évoluer, de passer à autre chose. Cette évolution de la réflexion à conduit il y a quelques mois au billet de réflexion Du pseudonymat au pseudonyme, et aux conséquences que j’ai évoqué dans mes billets 2017 - Mes projets pour cette année ? et Première semaine dans ma nouvelle vie.

En résumé, le fait d’indiquer de façon très claire mon pseudonyme sur mon CV m’a permis de trouver un nouvel emploi dans une entreprise qui me correspond, dans laquelle je m’épanouis.

Mais cet outing (car c’est vraiment comme ça que je le vis et le ressens, et l’usage de ce mot n’est pas anodin et reviendra dans la suite de ce billet de réflexions) n’est pas sans conséquence.

De la levée de mon pseudonymat

Quand je suis lors d’un événement public, en tant que Genma, j’apprécie que l’on vienne me féliciter, me remercier, m’encourager pour ce blog. Cela me fait plaisir et comme c’est dans le contexte, comme c’est dans le cadre où je suis en personnage public et où, si l’on m’appelle par mon prénom civil, il y a des chances que je ne réagisse pas.

Par contre, quand c’est à la machine à café qu’on m’appelle par mon pseudonyme, je ne suis pas encore habitué et cela me fait encore plus bizarre que l’on me dise "j’ai beaucoup aimé ton dernier billet de blog". Tout simplement parce que je ne suis pas dans la peau de mon personnage public. Mes collègues et surtout ma hiérarchie connaît mon pseudonyme, lit par conséquence mon blog et liront donc très probablement ces mots. Est-ce que cela change quelque chose ?

L’autocensure

L’autocensure c’est le fait de ne pas tout dire et je me suis toujours autocensuré d’une certaine façon. Il y a des choses que je ne veux tout simplement pas aborder sur le blog car je considère que ce sont des informations, des pensées, et des choses très personnelles. Et je pars du principe que tout ce que je mets sur ce blog tombe dans le domaine du public et le sera à jamais car Internet n’oublie pas. Un bon exemple des conséquences de cette mise à disposition de réflexions personnelles et celui que j’évoquais dans mon billet écrit il y a un peu plus de deux ans Ménage sur ce blog vers lequel je vous renvoie, qui montre à quel point le cumul d’informations sur quelqu’un peut être facile, rien qu’en lisant des billets de blog…

J’évoquais le passage du Du pseudonymat au pseudonyme et du ressenti que cela était comme une sorte de outing. Comme le dit l’adage, les paroles s’envolent et les écrits restent. En tant que personne publique, dans certaines conditions et dans certains milieux, auprès de certaines personnes de confiance, j’ai une parole plus libérée que je ne l’aurai jamais sur le blog. J’ai créé une sorte de personnage, avec son propre passé, sa mode de vie, noyant des informations personnelles au milieu d’informations fictives créés pour mon personnage. Mon personnage public est comme une sorte de personnage de jeu de rôle, un rôle que j’endosserai quand je suis en public. Selon les discours et les circonstances, selon la prise de position plus ou moins engagée, mon personnage peut être un homme cis hétéro en couple, avec des enfants, un célibataire, un homme gay... Je noie le poisson. Une façon de noyer une information, au lieu de ne pas la donner (et donc de la censurer), est de la donner publiquement et de la noyer au milieu d’autres informations contradictoires, de la faire passer comme un élément du personnage…

Pour en revenir à l’autocensure, au-delà du blog, il y a mon usage des réseaux sociaux, sur lesquels les réactions sont plus spontanées, moins réfléchies et moins relues (contrairement à mes billets de blogs que je retravaille, remanie…) Par principe, je ne fais pas de diffamation, je n’insulte pas, je ne cherche pas à blesser les gens. Ce n’est pas de l’autocensure, je reste moi-même et j’espère être une personne tolérante.

Mais je me pose des questions désormais sur la diffusion de prise de position politique ou militante, ce qui est très facile, surtout sur Twitter. Car être un personnage public c’est parfois être dans l’excès, on veut faire de l’audience, attirer à soi, flatter son égo. On recherche donc le bon mot. D’autant plus avec Twitter où le nombre limité de caractères conduit à choisir ses mots, à en prendre un plutôt qu’un autre, parce qu’il est plus court mais changeant du coup le sens de la phrase. On peut retwitter un twitt sarcastique, parler avec du second ou troisième degré et les personnes habituées de ma communauté, me suivant depuis longtemps, saisiront l’ironie.

Mais quelqu’un de nouvellement arrivé à me suivre comme ce peut être le cas pour mes collègues, auront peut-être des a-prioris et se feront des fausses idées. D’où mon appréhension. Ce n’est pas par peur du jugement. Je saurai défendre mon point de vue, me justifier… Je serai capable d’assumer. Mais je n’ai pas forcément l’envie de me justifier, de m’expliquer. Je pense que la solution la plus simple est déjà mise en place et de montrer mon professionnalisme et mes qualités au quotidien, de faire comprendre qui je suis durant mes heures de travail. Et que même si ma personnalité et mon personnage public ont une influence sur celui que je suis au quotidien et inversement, ce n’est pas forcément une mauvaise chose. Car il y a beaucoup de compétences et d’expériences que j’ai pu acquérir du fait de ma vie publique, associative…

Bref, je pense que je continuerai à faire comme je faisais avant et ce sera très bien comme ça. Si ce n’est que mon autocensure principale vient peut être plus en ce moment du fait que désormais, pour pouvoir entrer aux USA, dans la demande du formulaire ESTA, il faut donner les pseudonymes que l’on utilise en ligne et plus particulièrement ceux utilisés sur les réseaux sociaux. J’hésite donc avant de retwitter ou diffuser tout message un peu moqueur (on y revient), sur le Président actuel des Etats-Unis. Et quand on commence à se poser des telles questions, c’est peut-être là qu’est le vrai problème. Se savoir surveiller conduit à modifier son comportement, et j’en fais peu à peu l’expérience.

4 Messages

  • J’ai bien aimé ce post.
    Je trouvais que tu faisais moins de billets personnels et ne comprenait pas pourquoi, maintenant je comprends mieux.


  • C’est exactement pour ces raisons que je n’utilise que du pseudonymat. J’ai réellement plusieurs identités numériques, plusieurs pseudos et plusieurs vies. J’ai aucun profil public, pas besoin, j’ai vu les dégâts que ça pouvait faire sur une vie. Non merci.
    Ça me permet de pouvoir parler librement, sans avoir peur pour un futur emploi, une connaissance qui me jugerait, la famille. L’auto-censure, génère forcément frustration, et mène à la pensée unique, bien lisse, bien propre. Les débats n’avancent pas, les idées tolérées ne sont que celles politiquement-correcto-acceptables. La négation de l’individu au travers de son être qui s’exprime par ses pensées et ses opinions.


  • En effet, certains sujets et mélanges des genres sont à éviter lorsque l’on entre dans la sphére professionnelle. Bon, mes collègues savent que je suis tous sauf d’extrème droite, et pas de droite, mais ensuite, ça laisse de la marge. Peu connaissent mon activité internet et si j’ai cessé Icezine, c’est un peu pour éviter de rajouter de l’huile sur le feu en ces temps de présidentielle. J’avais tenté le mélange des genres en 2011-2012, sans forcément beaucoup de succès et j’ai depuis pris un autre axe.
    Est-ce que je m’autocensure ? Si j’avais continué à aborder la politique, je ne pense pas, car je l’aurais fait bien à part. Reste alors Twitter et/ou facebook où il vaut mieux dissocier profil perso et profil... politique. J’ai pu voir les opinions politiques de mes contacts de l’époque et ça ne m’a pas vraiment fait plaisir pour quelques uns d’entre eux. On change avec le temps... Et là, effectivement, je m’autocensurait sur le profil perso et je me lachais par ailleurs sur le profil politique ou sur twitter. Là encore, le mélange des genres passe mal, surtout dans un milieu comme la protection animale, infiltré par pas mal d’extrémistes de tous poils (je l’ai fait exprès :p ).
    Mais là encore, au bout d’un moment, j’ai fini par m’autocensurer, lassé par ces prises de becs. Ca vallait aussi sur Diaspora* et je suis aujourd’hui bien content de vivre ma vie de mon coté, tout en commentant un peu où je veux, sans censure. C’est là que finalement on se dit que la "centralisation" d’un réseau social est néfaste.


  • Salut,

    Je trouve ca tout de même triste de s’autocensurer par crainte d’une administration, qui plus est, étrangère. Ca montre le degré de servitude auquel on se soumet, presque avec entraint, à l’égard des États-Unis.

    Cela dit, je ne crois pas qu’il soit (encore) obligatoire de dévoiler ses pseudos : http://www.bons-plans-voyage-new-york.com/lessentiel-avant-de-partir/a-partir-du-8-septembre-2010-demande-esta-obligatoire-pour-les-etats-unis-devient-payante/

    Pour le reste, utiliser un pseudo ou non, c’est évidemment une question de gestion du risque. Le nom de plume, c’est vieux comme l’écriture :).